Lever 6h45. Je prends une douche salée mais bien fraîche qui réveille. Je prépare mes affaires et sors dans la rue principale où je devrais normalement prendre mon petit déjeuner mais on est en basse saison et le personnel sensé être là pour me le servir n'est pas là. Du coup j'attrape un jus de fruits frais dans la rue et me rends, toujours pieds nus, au terminal de bateau.
Le premier arrive même avant huit heures. Comme j'ai bien commencé la journée sans petit déjeuner, j'enchaine avec une "epic failure" au moment de descendre dans le bateau où mon pied gauche a glissé sur les planches humides et me voilà, les sacs sur le dos, à faire un semi grand écart, ma jambe droite, du genoux jusque sur le dessus du pied, ayant bien ripé sur la surface de la planche. Je me relève et vais m'installer dans le fond. Je sors un sachet de cicatryl et, après avoir nettoyé avec un peu d'eau, en passe sur mes diverses blessures.
La traversée est rapide et le bateau pas très chargé. On arrive vers 8h25. Je montre mon ticket open en descendant et un gars me dirige vers sa carriole et me demande 50 000 Rp pour aller jusqu'au départ des minibus. Je lui dis que je préfère marcher et prend mon téléphone pour appeler Sonya, qui ne répondait pas, du coup j'appelle la compagnie qui vend les tickets. Le gars au bout du fil m'explique que je dois me rendre à un bar devant lequel les minibus partent à 1 km de là.
Une fois fini de téléphoner j'ai tout de suite un autre gars en carriole qui lui me propose de m'amener pour seulement 10 000 Rp. Ce sera donc mon baptême de carriole. Je retrouve au bar le couple de québécois qui était assis en face de moi dans le bateau. Ils me disent que le bus devrait être dans une petite heure. Je décide donc de poser mes sacs et de commander quelque chose à manger. Je prends un milkshake à la noix de coco et un "nasi campur", un sauté de poulet au légumes dans une sauce soja avec du riz et un oeuf.
Je dis au couple de retraités du Québec de bien vouloir s'asseoir avec moi sinon ils vont en avoir marre de rester debout à attendre le minibus - pour reprendre son expression bien imagée "tu peux l'attendre, ils sont en train de faire le goudron sous ses roues", bref il va pas arriver de si tôt - et s'ensuit donc une longue discussion avec monsieur principalement.
D'abord au sujet de leur aversion pour les canadiens anglophones, puis de ça à la déforestation agressive dans certaines zones d'Indonésie, la pollution, le pétrole, les gaz de schiste, les sables bitumineux bien sur et bien d'autres choses. L'homme et vraiment intéressant et globe-trotteur. Avec sa femme au début de leur retraite ils ont attaqué par une visite de leur immense pays d'un bout à l'autre jusqu'au dessus du cercle polaire, en camping car, 27 000 km en trois ans.
Il se commande lui aussi à manger et me raconte qu'ils sont sur un billet open pour se rendre jusqu'à Flores. Il me parle aussi des différences entre l'Indonésie d'il y a 20 ans et celle d'aujourd'hui. Il a à peine le temps de finir son plat - il a commandé le même que moi l'odeur lui ayant donné la faim - que son minibus arrive. On se salue et se souhaite à chacun un bonne suite de voyage. Le mien arrive quelques minutes plus tard. J'embarque avec un groupe d'allemands. Le trajet est d'environ trente minutes. Je me fais déposer chez Sonya, vais la saluer et lui demande si je peux utiliser un point d'eau pour nettoyer mes pieds et remettre chaussettes et chaussures.
Je vais ensuite faire un peu de change car je suis à sec. Je le fais chez celui qui m'a loué la voiture tout proche d'ici. Je négocie avec lui un transport pour le centre de Mataram où se situent deux temples et un marché sympa à faire. Je suis le premier client de la journée, j'ai droit à un bon prix et à la bénédiction avec les billets - dans le commerce asiatique, en Thailande, Birmanie, Laos, Vietnam mais ici aussi, quand le premier client achète, avec son argent, le vendeur bénit le reste de son étal ou lui-même pour porter chance pour le reste de la journée. Je pars récupérer mes sacs, remercie mama Sonya pour sa gentillesse et vais prendre mon taxi particulier.
Le chauffeur est super sympa et me donne pleins de conseils,, entres autres de prendre le "damri", bus public, pour me rendre à l'aéroport, c'est beaucoup moins cher qu'un taxi. Je lui dis que je verrai avec mes amis pour m'organiser ça. Il me dépose vers midi au palais flottant de Mayura. Il y a à l'intérieur un grand bassin au sein duquel cet ancien palais royal flotte et au fond un temple hindou. L'endroit est calme et j'en profite après avoir visité pour me poser à l'ombre sous un arbre sur un banc et je continue de rédiger la journée d'hier.
Je traverse ensuite la route pour me rendre au temple de "Pura Meru", le plus grand temple hindou de Lombok, datant de 1720 et dédié à la trinité hindouiste Brahma, Vishnu et Shiva. Le principal attrait sont les trois "meru" - sanctuaires à plusieurs toits - couverts de chaume, le plus grand étant la demeure de Shiva.
Je prends quelques photos et retrouve les gardiens à l'entrée qui ont gardé mon gros sac. Ils sont bavards du coup je m'installe avec eux sur la paillasse couverte, prend quelque chose à manger dans le petit stand juste à coté et discute le coup pendant une bonne demi-heure.
Je repars sous un ciel de plus en plus couvert, mes deux sacs sur le dos, en direction du marché de Cakranegara tout proche. Je reconnais le type de marché que j'ai connu à Ho Chi Minh avec des minuscules allées où je passe tout juste avec mon bardas sur le dos. Je m'empreigne de toutes les couleurs et les odeurs, épices, poissons séchés, fruits, poissons frais.
Je fais quelques achats par la même et ressors une bonne demi-heure plus tard. J'achète entres autres les fameux Salak, les fruits à peau de serpent, peu juteux mais sucrés avec une chair dense faisant penser au jackfruit.
Je descend la rue principale un peu et attend de voir passer un taxi blanc. Je tombe sur un chauffeur lui aussi bavard, avec un anglais parfait. Je comprends vite pourquoi. Il a eu un diplome dans l'hotellerie et a travaillé sur un paquebot basé en Alaska, sur les eaux du monde pendant quatre ans, dans un hôtel en Arabie Saoudite pendant quatre ans dans un grand hôtel. Le court trajet était vraiment sympa.
J'arrive un peu en avance par rapport à l'heure prévue mais retrouve les parents de Valentina qui elle est en train de faire du shoping avec sa cousine, la petite Safira. Du coup, une fois les sacs posés et un thé préparé, je m'en vais dans la cuisine avec mama pour découvrir deux recettes indonésiennes et participer à la préparation. J'ai bien fait de renter plu tot car il se met à pleuvoir peu de temps après. Valentina arrive avec Safira un peu plus tard. Elle est contente de voir que je suis bien arrivé et que j'ai trouvé ma place derrière les fourneaux avec sa mère. Je prends des notes sur ma tablette avec tous les noms en bahasa indonesia et les manipulations.
Je découvre quelques nouveaux ingrédients comme le "tempe", un genre de pain de soja, et le "gula meru" une pâte faite avec de l'eau de coco qui sert à la préparation de la sauce pour les brochettes à base de cacahuètes. Elle me fait passer aux fourneaux pour cuire moi-même quelque beignets de soja "tempe mendoan". On passe une bonne heure à tout préparer et elle me propose d'y gouter tout de suite mais j'ai mangé à 14h du coup je lui dis que j'essaierai au dîner.
On convient pour demain matin que je me joigne à eux quand ils vont au marché et que le papa me dépose à la station de damri pour me rendre à l'aéroport. J'aurai certainement un peu d'attente mais j'arriverai assez tôt pour acheter mon billet. Jusqu'à sept heures je continue de rédiger mon blog et je dîne avec Valentina et sa maman vers 19h30. Le bouillon qu'on a préparé sert de base à la soupe. On met des nouilles de riz fines, du choux émincé, du soja dans le bol, des oignons frits, de la sauce aux cacahuètes, de la pousse d'oignons, des "krupuk" brisés et le bouillon par dessus. C'est un vrai délice et je me ressers de quelques aliments pour finir mon bouillon. Valentina m'a acheté un dessert, un genre de pudding à base de riz, un peu comme une terrine avec différentes couleurs, bien sucré et doux ("manis" en bahasa indonesia).
Un peu plus tard on est installé dans le petit salon et on discute un peu de tout avec le passage par les questions personnelles non posées jusque là. D'abord je suis encore une fois étonné de la politesse de mes hôtes lorsque Valentina me demande si c'est inconvenant que sa mère me demande mon âge. Je lui dis qu'il n'y a aucun problème mais que je la laisse deviner. Et là je suis agréablement surpris de voir qu'elle me donne seulement 25 ans, l'âge de sa fille. De mon coté je n'apprendrais pas son âge exact mais elle m'a remercié quand j'ai dit 47 donc elle doit être un peu au dessus de la cinquantaine.
On discute de pas mal de choses et à un moment maman va chercher une petite poterie de Banyumulek, petit village potier non loin, et un verre en bois avec un petit couvercle, en cadeau pour moi en signe du bonheur que ma visite de ces quelques jours a apporté. Elles me disent que c'est assez rare que les couchsurfers qu'ils accueillent ne se fondent autant dans leur vie de famille et c'est une première que quelqu'un se mette vraiment aux fourneaux avec maman. Je les remercie et suis touché par le geste et par ce remerciement de leur part pour mon attitude.
Demain c'est marché du coup toute la maisonnée est couchée avant neuf heures. Moi je traîne encore un peu maintenant que le wifi remarche (il ne marchait plus pendant l'orage) et profite de la vitesse pour envoyer les photos des deux derniers jours. Je pousserai un peu plus loin en envoyant quelques demandes de couchsurfing sur Yogyakarta pour la semaine à venir. Je vais me coucher vers 22h30, le réveil réglé à 5h comme dimanche dernier.